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le cercle de fer

tard, a dressé au travers de sa route cette absurde anglophobie dont la virulence révolta l’Angleterre et la rejeta définitivement vers nous. Et s’il y avait pourtant une alliance précieuse pour l’Allemagne de demain, pour cette Allemagne inachevée et condamnée à poursuivre bientôt son laborieux achèvement, c’était l’alliance anglaise !

À notre point de vue français, cette inaptitude de la nation voisine à seconder les initiatives géniales de son empereur n’aura pas été sans avantages. L’année 1904 s’est ouverte pour nous sur une situation nouvelle, sur un fait considérable : l’isolement de l’Allemagne en face de la France alliée de la Russie, amie de l’Angleterre, réconciliée avec l’Italie, environnée des sympathies certaines de l’Espagne et des États-Unis.

D’inoubliables événements attestent l’évidence de cette situation. Les spectacles dont la rade d’Alger fut le théâtre, le voyage en France du roi Édouard vii, l’enthousiasme avec lequel le président Loubet a été accueilli à Londres, le séjour à Paris des souverains d’Italie, les échanges de visites entre députés français et députés anglais, enfin la venue du comte Lamsdorff et, pour couronner le tout, la lettre solennelle du tsar approuvant les orientations nouvelles de la politique française, ce sont autant de preuves tangibles de la revanche morale qui s’est opérée en Europe au profit des vaincus de 1870.

Ce résultat, nous avons le droit d’en être fiers car il est, avant tout, notre œuvre. Il résulte de notre foi invincible en la patrie, de notre persévérante aspiration vers un relèvement possible ; il est la juste récompense de trente années de labeur ininterrompu. Reconnaissons toutefois que les maladresses germaniques y ont leur part.

Et, par-dessus tout, la maladresse initiale de celui auquel les Germains prodiguent encore les témoignages d’une reconnaissance qui se trompe d’objet. C’est Bismarck qui