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la fortune de l’hellade

Dans un livre tout récent, M. Edmond Théry répond à de telles questions et, suivant sa coutume, il ne formule la réponse qu’après avoir procédé à une de ces enquêtes lucides et pénétrantes dont le mécanisme est son secret. Je suis toujours charmé quand on me parle de la Grèce sans mentionner Périclès. Qu’on sous-entende perpétuellement l’auguste passé, c’est normal ; il serait trop sot de jamais le négliger. Mais, pour Dieu ! que l’ombre de sa poussière ne fasse pas oublier le présent si plein de vie et de force. La Grèce qui se dégage des chiffres habilement groupés et analysés par M. Théry est aussi vivante que peut le souhaiter mon philhellénisme ; mais elle n’est pas aussi riche qu’elle devrait l’être, même en tenant compte de la mévente du raisin sec ou des prodigalités de feu M. Tricoupis.

Le contrôle ne semble pas susceptible d’y remédier ; il a accompli son œuvre. Pour le service des emprunts contrôlés (ceux des Monopoles et du Funding, les 5 pour 100 1881, 1884 et 1890 et le 4 pour 100 1889) il a pris, on doit l’avouer, ce qu’il y avait de meilleur, à savoir : les recettes du sel, du pétrole, des allumettes, des cartes à jouer, de l’émeri de Naxos aussi bien que celles des douanes du Pirée, des tabacs et des timbres ; mais il a introduit dans l’utilisation de tout cela un ordre rigoureux, de bonnes méthodes ; la Grèce, de son côté, y porte sa sagesse et sa bonne volonté. Ainsi se refait peu à peu le crédit dont elle a grand besoin.

Entre temps, toutefois, il faut qu’elle vive et le mieux possible, puisqu’il en est des nations comme des individus : on ne prête qu’aux riches. Sait-elle tirer bon parti de ce qui est laissé entre ses mains, de ce que le contrôle n’atteint pas ?… On dirait que le gouvernement hellène s’abandonne quelque peu en présence de la minuscule augmentation accusée par les impôts directs. C’est entendu : l’impopularité de ces taxes est extrême ; le long atavisme des dîmes en nature bataille vigoureusement dans l’âme paysanne contre la conception moderne de la contribution