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L’ERREUR INITIALE


22 novembre 1905.

Il y avait, en France, trois choses qu’il ne fallait pas faire : 1o toucher à l’armée ; 2o rompre avec le Vatican ; 3o gêner le mouvement mutualiste… on les a faites ou on va les faire. Par contre, il y en avait trois autres qu’il fallait faire : 1o réformer l’éducation ; 2o transformer le commerce colonial ; 3o décentraliser… on ne les a point faites. Voilà le mal dont nous souffrons.

L’armée de la République en était arrivée à vivre en équilibre stable sur deux bases contradictoires ou du moins jugées telles non seulement par Tocqueville mais par la plupart des grands penseurs : la perfectibilité professionnelle et la subordination à un gouvernement démocratique parlementaire. C’était là un chef-d’œuvre sans précédent, un miracle du patriotisme. Le grand nom de Gambetta y demeurait attaché. Par ses actes plus encore que par ses paroles — notamment lorsqu’il avait choisi le général de Miribel comme chef d’état-major général — l’illustre tribun avait contribué à créer cet état de choses devant lequel l’opinion étrangère manifestait une admiration étonnée. Il est à croire que la postérité ne ménagera pas ses louanges aux hommes de parti qui surent rivaliser sur ce terrain d’abnégation réciproque ; mais, assurément, elle jugera avec une sévérité justifiée l’initiative de ceux qui s’employèrent à ébranler une institution nécessaire au pays et à risquer sa ruine. Le bon sens le plus élémentaire commandait de n’y