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cosas de españa

destinaient, à défaut des batailles navales, aux échanges lointains et le sort, en même temps qu’il enlevait à sa fougue guerrière les occasions de s’alimenter, a atteint sa puissance de production et de consommation. Incohérence historique aussi, car l’entreprise superbe dont elle se réclame est précisément en ruine autour d’elle, en sorte que tout regard jeté par ses fils sur son passé est fait pour désavantager et, si l’on peut ainsi dire, pour handicaper lourdement le présent. Incohérence religieuse encore, car les sentiments les plus aigus se heurtent étrangement à cet égard dans l’âme espagnole…

Pourtant il faut que l’Espagne vive et prospère. Première d’une race qui s’inscrit, dans les statistiques mondiales, immédiatement après la race anglo-saxonne, elle est demeurée jusqu’ici, pour ses colonies émancipées qu’attendent de si belles destinées, une sorte de clef de voûte morale et il importe aux amis de la paix qu’elle le demeure bien longtemps encore. On nous parle souvent des États-Unis d’Europe, conception monstrueuse qui aboutirait à organiser entre deux continents des luttes effrénées. Notre vieille Europe doit au contraire espérer ne point voir se rompre les deux câbles qui l’unissent au nouveau monde et par là assurent son repos : l’Angleterre est l’un, l’Espagne est l’autre.

Tel apparaît l’avenir. Pour l’assurer, une seule recette : le libéralisme. Quoi donc de plus fortuné que d’assister à l’élévation d’une princesse que sa race, son intelligence, son éducation et ses penchants désignaient, semble-t-il, pour incarner l’orientation si heureuse qu’esquissait, dès le début de son règne, le prince charmant dont elle devient ta compagne ?