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Page:Counson - Malherbe et ses sources, 1904.djvu/121

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de lecteurs et de disciples, il n’y a du reste pas de barrière, La Fontaine par exemple est presque autant de la seconde que de la première, et beaucoup d’autres aussi aiment tout dans Horace. Mais chacun est un peu plus de l’un que de l’autre groupe, et Malherbe, comme Voltaire, est tout à fait du premier.

On dit qu’il avait fait d’Horace son livre de chevet, « son bréviaire », Racan[1] affirme du moins qu’il l’estimait, et Ménage raconte qu’ « il blâmait souvent »[2] un vers d’Horace contenant une métaphore non continuée : on sait que Malherbe, logicien versificateur, attachait aux métaphores continuées autant d’importance que Théophile Gautier ; et s’il choisit un exemple dans Horace, c’est qu’il le lisait beaucoup. Il s’en souvient à tout moment : sous un passage de Desportes, il écrit : « il veut représenter le tinctus viola pallor amantium ; mais il n’en approche pas[3] » ; il paraphrase l’exclamation sceptique : credat Judaeus Apella, non ego[4] en

  1. Loc. cit., LXX. — Baillet, Jugements des savants (éd. revue par La Monnoye, Amsterdam 1725), t. IV, p. 195 (article : Malherbe) : « On peut dire après Mr. de Brieux qu’Horace étoit son unique Patron et le seul modèle sur lequel il vouloit se former. C’étoit, dit-il, l’ami du cœur de notre Poète, il ne se contentoit pas de l’avoir dans son cabinet, il l’avoit encore sous le chevet de son lit, sur sa toilette, aux champs, à la ville, et il l’appelloit ordinairement son Bréviaire, comme le racontoit souvent Mr. de Grentemesnil qui l’avoit connu particulièrement »
    (Mosanti Epist. ad calcem 2. partis Poëmatum, pag. 109).
  2. O. c., p. 469.
  3. Malh., IV, 251. (Hor., Odes, III, X, 14).
  4. Hor., Sat., I, V, 100-101.