temps-là ont mis aussi dans d’autres œuvres leurs sentiments et leurs idées, c’est-à-dire une partie des sentiments et des idées d’Israël, en qui le christianisme les avait habitués à voir, en quelque sorte, leurs ancêtres moraux : comme il y avait alors une poésie lyrique — ou réputée telle — rien de plus naturel que l’employer à paraphraser la Bible. Aussi c’est ce que tout le monde faisait[1]. Clément Marot s’était déjà attaché à cette besogne, et les accents modulés sur son « flageolet » avaient éveillé des échos inattendus : on était justement à se disputer sur la lecture des textes sacrés, et les réformés faisaient aux Psaumes un succès compromettant. Ce fut même pour combattre Marot que Desportes se mit à sa traduction : et si, suivant les paroles de Mathurin Régnier son neveu,
Sur le luth de David on a chanté ses vers[2],
c’est un fait qui intéresse plus l’histoire religieuse que la
poésie française. À ce dernier point de vue, Malherbe
jugea les Psaumes de Desportes, et il leur préféra bravement
la soupe de l’abbé. Lui-même en fit, pourtant, des
paraphrases, sans être beaucoup mieux préparé que ses
prédécesseurs.
Un esprit pratique et positif traite volontiers la religion comme une institution sociale quelconque, il en
- ↑ Voir par exemple G. Grente, Jean Bertaut, pp. 216-222. La mode, qui sévit déjà au XVIe siècle, se perpétuera chez les poètes de toute la période classique. Autour de Malherbe même tous paraphrasent : Bertaut d’abord, plus tard Racan (v. Arnould, Racan, p. 485) et même les dames (la vicomtesse d’Auchy entreprend de paraphraser saint Paul). Plus tard Bois-Robert paraphrase encore.
- ↑ Régnier, Satire IX.