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LA FRANCE ET L’ALLEMAGNE EN CHINE.

l’occupation provisoire des Tcheou-chan, de la possession définitive de Hong-kong ; se réduire à une action commerciale, quel que soit l’intérêt des travaux dus aux attachés commerciaux de la Mission Lagrené, eût été pour la France se contenter du second rang après l’Angleterre, à côté des États-Unis ; l’intervention officieuse pour les Missions donnait à la France une situation à part, la constituait médiatrice entre les pays de chrétienté et la Chine souhaitant alors un rapprochement, lui fournissait l’occasion d’exercer son influence, de l’accroître par l’usage. « Peut-être, écrivait le négociateur français, le seul moyen de rapprochement efficace entre la Chine et le reste du monde, réside-t-il dans l’élément chrétien. Grace à sa diffusion, les barrières finiront par tomber quelque jour, et les deux civilisations, sinon par se confondre, au moins par se rapprocher. La Mission de Chine pourrait [ainsi] à bon droit revendiquer l’honneur d’avoir laissé quelques traces. » Ce terrain d’action heureusement choisi devait rester celui de la politique française, en attendant que d’autres champs s’ouvrissent à notre activité. Si, en effet, le cabinet Guizot adopta sur ce point les vues de son envoyé, il n’eut pas autant de décision pour la fondation, soit en Annam, soit aux îles Basilan, d’un établissement français, dont il était dès lors question.

Les successeurs de Lagrené imitèrent son attitude ; malgré la pénurie où les laissait le gouvernement français, ils surent se faire respecter. C’est ainsi que nous voyons de Montigny, consul à Chang-hai (1847-1859) se faire redouter du tao-thai en balançant « comme la foudre sur sa tête » le nom du ministre de France résidant alors à Canton, établir la concession française malgré des protestations étrangères, protéger les missionnaires : sans ces deux questions, la France se serait laissé oublier. Des résultats durables étaient ainsi obtenus grâce au zèle et à l’intelligence d’un agent « souvent en désaccord avec une bureaucratie arriérée ». Les parages aussi lointains étaient dédaignés en France. Le manque d’intelligence des affaires de Chine apparaît bien nettement en 1854-1857. L’administration chinoise de Chang-hai, complètement désorganisée par les attaques des Thai-phing, avait cessé de percevoir les droits de douane ; les commerçants, restés débiteurs de sommes importantes, avaient hâte d’apurer leurs comptes ; d’accord avec le tao-thai, une commission fut formée d’un représentant de chacun des consuls de France, d’Angleterre, des États-Unis et chargée provisoirement de percevoir les droits. Le nouveau sys-