Page:Courant - La France et l'Allemagne en Chine d'après un livre récent, 1903.pdf/13

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
519
LA FRANCE ET L’ALLEMAGNE EN CHINE.

officiellement nié par Rochechouart. Quoi qu’il en soit, cet agent manqua de fermeté ; mais il savait que, depuis l’affaire du Mexique, les expéditions lointaines n’étaient pas bien vues en France. D’ailleurs, la guerre avec l’Allemagne, survenant quelques semaines plus tard, aurait arrêté toute tentative de pression ; la France dut, en effet, se contenter d’un règlement insuffisant, dont la mémoire a pesé longtemps sur nous.

Au lendemain de nos désastres, la question du protectorat cesse d’être seule à nous toucher en Chine de nouveaux intérêts nous sont imposés par l’initiative privée. Un commerçant français de Han-kheou, Jean Dupuis, avait entrepris de fournir des armes aux autorités du Yun-nan, alors en lutte contre les rebelles musulmans ; muni de passeports et de recommandations du gouvernement chinois pour les mandarins annamites, Dupuis résolut de prendre la voie du fleuve Rouge qu’il avait explorée ; au début de 1873, il se trouva dans le fleuve avec sa flottille, attendant la permission de poursuivre sa route des autorités annamites qui, sans s’opposer ouvertement à son expédition, cherchaient à gagner du temps. Au même moment, l’Annam protestait à Saïgon contre la violation de son territoire. L’entreprise de Dupuis, bien que de nature privée, avait reçu les encouragements du ministre de la marine et de l’amiral Dupré, gouverneur de la Cochinchine. Ce dernier, dont l’intervention était sollicitée par Dupuis et par les Annamites, se décida, à l’automne, à envoyer au Tonkin Francis Garnier avec mission de rétablir l’ordre ; les instructions ne précisaient pas de quelle façon ; ce vague laissait les Annamites libres de croire que l’on accédait à leur demande, et permettait à Garnier d’agir suivant les circonstances. Cet officier chercha à négocier une entente et un traité de commerce avec le commissaire annamite envoyé de Hué ; Nguyen Tri-phuong, commandant de la forteresse de Hanoi, s’y opposa, fit traîner les pourparlers, entoura les Français et prépara l’attaque. Garnier dut attaquer lui-même et, le 20 novembre, avec une centaine d’hommes, il s’empara de la citadelle. Il fut amené à s’établir sur plusieurs points du delta, à organiser un gouvernement annamite provisoire : l’évêque, Mgr Puginier, souhaitant que l’ordre ne fût pas troublé dans la population, l’aidait de ses sages conseils ; l’amiral Dupré, envoyant des renforts, approuvait. Mais Garnier, tué le 21 décembre, fut alors traité d’aventurier, bien qu’il soit établi qu’il avait agi par ordre. M. Philastre arrivait bientôt au Tonkin ; une convention signée dans l’intervalle par le commandant