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la revue de paris

coûtent plusieurs centaines de taëls ; d’après les prix du sud de la Chine, on paie par jour environ trente taëls[1] pour un bouffon et jusqu’à cent taëls pour un premier rôle, à raison de deux séances de trois heures chacune ; de plus, l’hôte et ses invités font des cadeaux de toutes sortes aux acteurs, et ceux qui ont plu s’en retournent comblés.

Un magistrat provincial a la comédie dans son yamen à meilleur compte. Les troupes qui résident dans la ville ne sont soumises à aucun impôt ; elles ont besoin, pour donner des représentations, d’une simple autorisation qui ne se refuse presque jamais, mais qui est payée de façon ou d’autre aux officiers subalternes ; en outre, les acteurs sont tenus de donner trois jours de représentation dans la résidence du mandarin aux fêtes du nouvel an, à son anniversaire de naissance et dans d’autres circonstances analogues. Le salaire fixé est alors de huit taëls, auxquels il est d’usage d’ajouter un porc et des pains cuits à la vapeur ; ce qui n’empêche pas les fonctionnaires généreux d’y joindre des cadeaux plus importants.

Les familles qui ne sont pas assez riches pour faire venir les comédiens chez elles s’entendent pour les engager à frais communs : si l’on manque de place chez soi, on loue une de ces « maisons de réunion » si nombreuses à Péking et qui appartiennent à des corporations ou à des associations provinciales. C’est dans ces maisons aussi que les grandes corporations célèbrent chaque année la fête de l’esprit qui leur sert de patron : ces réjouissances ressemblent beaucoup à celles qui ont lieu chez les gens riches ; elles se composent essentiellement de banquets et de représentations théâtrales payés par la caisse commune. Parfois l’un des membres de la corporation doit, à titre d’amende pour quelque contravention, offrir une fête de ce genre à ses collègues. Il n’est pas jusqu’à l’Empereur qui, bien qu’ayant ses comédiens ordinaires, n’appelle de temps à autre une des troupes de Péking pour la faire jouer dans une salle du Palais.

Le théâtre est donc, dans la capitale et dans les grandes villes, l’un des divertissements les plus chers aux Chinois ; il a sa place dans leur vie officielle, commerciale ou familiale. Les

  1. Le taël vaut quatre francs.