Page:Courteline - La philosophie, 1922.djvu/72

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dieu, un jeune homme, on se reprend à l’aimer pour ces mêmes sentiments qui vous avaient lassé de lui : ses candeurs et ses emballements agaçants et irréfléchis, ses pudeurs conscientes d’elles-mêmes dissimulant leur fausse honte derrière une forfanterie du vice qui lui ferait avaler au besoin des rivières entières de purin sans broncher, sa rage d’épater le monde et de trancher les questions sans en connaître le premier mot, et sa même attirance absurde vers tout ce qui est la chimère, le paradoxe, l’extravagance et le pourpoint de velours grenat. Ainsi, par la pensée, on revoit avec plaisir de vieux amis laissés de côté comme ennuyeux et de qui on se dit, une pointe de repentir à l’âme :

— Un peu nigauds, un peu turbulents, c’est possible ; mais si honnêtes gens, au fond !

Il vaut mieux gâcher sa jeunesse que de n’en rien faire du tout.