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poésies.


« Ô Carillon, je te revois encore,
Non plus, hélas ! comme en ces jours bénis
Où dans tes murs la trompette sonore
Pour te sauver nous avait réunis.
Je viens à toi, quand mon âme succombe
Et sent déjà son courage faiblir.
Oui, près de toi, venant chercher ma tombe.
Pour mon drapeau je viens ici mourir.

« Mes compagnons, d’une vaine espérance,
Berçant encor leurs cœurs toujours français,
Les yeux tournés du côté de la France,
Diront souvent : reviendront-ils jamais ?
L’illusion consolera leur vie ;
Moi, sans espoir, quand mes jours vont finir,
Et sans entendre une parole amie,
Pour mon drapeau je viens ici mourir.

« Cet étendard qu’au grand jour des batailles,
Noble Montcalm, tu plaças dans ma main,
Cet étendard qu’aux portes de Versailles,
Naguère, hélas ! je déployais en vain,
Je le remets aux champs où de ta gloire
Vivra toujours l’immortel souvenir,
Et, dans ma tombe emportant ta mémoire,
Pour mon drapeau je viens ici mourir.

« Qu’ils sont heureux ceux qui dans la mêlée
Près de Lévis moururent en soldats !
En expirant, leur âme consolée
Voyait la gloire adoucir leur trépas.