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journal du siège de paris.

magnifique le jour, froid la nuit. Les prisonniers faits dans les combats d’hier portaient presque tous la médaille militaire. Ils étaient horribles à voir, pâles, exténués, d’une saleté repoussante. Ils ont déclaré que, depuis le 24 juin ils n’avaient jamais couché dans un lit et que, depuis cinq jours, ils ne mangeaient que des pommes de terre à moitié bouillies. Un des officiers badois condamnés à mort la semaine dernière, a réussi à s’échapper de Versailles. Il a traversé la Seine à Neuilly et s’est constitué prisonnier entre les mains des Français. D’après ce qu’il dit, l’armée prussienne serait en proie à une démoralisation profonde et à la misère. Les soldats n’ont plus de souliers et les rations manquent presque complètement. Cet officier est le neuvième enfant que la guerre a enlevé à sa famille. Son père, âgé de 62 ans, a été incorporé dans l’armée active. Ce matin, on a conclu un armistice de quatre heures pour enterrer les victimes de la bataille d’hier. À part quelques coups de fusil entre les avant-postes et une douzaine d’obus lancés par les forts, la journée a été calme. Vermorel, le rédacteur du Courrier français, si souvent accusé de faire partie de la police, s’est rendu aujourd’hui au bureau du Moniteur de la République, pour demander raison d’un article dans lequel on l’accuse d’avoir mangé au râtelier impérial. On a échangé des soufflets. À quand les coups d’épée ? Louis Blanc, dans les journaux de ce matin, adresse un appel éloquent au peuple anglais. C’est parfait au point de vue littéraire. Sous le rapport politique, je