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journal du siège de paris.

journée a un peu diminué le froid. Le bombardement des forts d’Issy, de Vanves et de Montrouge se continue avec une intensité incroyable. Au coin du boulevard de Strasbourg, vers quatre heures de l’après-midi, un capitaine de la garde nationale annonce à un groupe dont je fais partie que les obus des Prussiens ont franchi le mur d’enceinte et sont tombés dans la rue Daguerre, près du cimetière Montparnasse. Une maison a été effondrée, et une femme et deux enfants ont été tués. Le récit du capitaine ne rencontre que des incrédules. Je continue ma route jusqu’à la rue Drouot, devant la mairie du neuvième arrondissement, où se tient un véritable club en plein vent. Un garde national vient annoncer que les bombes des assiégeants sont tombés à Plaisance, à l’extrémité du quartier latin. Ici, on se montre encore plus incrédule que sur le boulevard de Strasbourg. On traite de Prussien le malheureux qui a apporté cette mauvaise nouvelle et on le conduit au poste. Nous saurons demain ce qu’il y a de vrai dans ce commencement du bombardement de Paris, car, jusqu’à ce jour, les forts seuls ont été atteints par les projectiles de l’ennemi.

Vendredi, 6 janvier. — Le temps s’adoucit un peu. C’est malheureusement trop vrai, le quartier latin a reçu le baptême du feu. Les obus prussiens ont tué six personnes à Plaisance. Aujourd’hui, le bombardement, commencé hier, continue à faire rage. Les Parisiens n’en sont pas autrement effrayés. Comme les canons Krupp ne peuvent atteindre que le côté sud, la