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journal du siège de paris.

Dimanche, 8 janvier. — Le froid semble vouloir revenir. Nous avons enfin des nouvelles de la province. Gambetta nous annonce que Faidherbe a remporté, le 3 courant, à Bapaume, une grande victoire sur les Prussiens. Chanzy réussit à maintenir le prince Frédéric-Charles sur la rive gauche de la Loire. Cela ne nous suffit pas, car si l’armée de la Loire ne vient pas à notre secours, il faudra bien que nous succombions, puisque le pain nous manquera bientôt. Il est déjà noir et lourd comme le pain de seigle. On annonce qu’il sera rationné à partir de demain. Nous n’aurons plus que trois cents grammes par personne. Le bombardement a fait rage toute la journée. Au point de vue de la capitulation de Paris, c’est tout à fait inoffensif. Malheureusement, il y a chaque jour une dizaine de victimes. Déjà, au quartier latin, on descend dans les caves, espérant y trouver un refuge contre les obus. Tout ce qui est comestible atteint des prix insensés. Les rats d’égoût, qui sont les plus recherchés parce qu’ils sont plus gros et plus gras que les autres, se vendent maintenant trois francs pièce. Un chat vaut vingt-cinq francs. Le chien continue à se vendre à des prix moins exagérés. On annonce la mort de Prim, tué par les républicains de Madrid. Veuillot prétend que l’homme qui a mis fin aux jours de ce trop célèbre conspirateur, a volé la potence. M’est avis qu’il a raison.

Lundi, 9 janvier. — Le temps est redevenu très froid. Aujourd’hui le bombardement a été effrayant : c’est