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dernières lettres.

tacle d’une grande cité où la majorité est si lâche et la minorité si audacieuse et si corrompue.

Lundi dernier, 8 mai, le 442e anniversaire de la délivrance d’Orléans par Jeanne d’Arc a été célébré, mais avec moins de pompe que d’habitude. Pas de cavalcade, pas de feu d’artifice, ni d’illumination. Vu les cirsconstances douloureuses que la France traverse depuis bientôt un an, le conseil municipal a décrété de distribuer aux veuves et aux orphelins faits par les combats livrés autour d’Orléans, les sommes que l’on dépensait, les années précédentes, pour célébrer l’anniversaire de la défaite des Anglais sous les murs de la cité orléanaise. C’est l’Église seule qui a fêté cette glorieuse date du 8 mai. La cathédrale de Sainte-Croix était pavoisée à l’intérieur, le chœur avec des oriflammes rouges brodés en or, la nef avec des drapeaux bleus et blancs sur lesquels se détachaient de nombreuses fleurs de lis. À dix heures et demie, on a fait le panégyrique de Jeanne d’Arc dont je n’ai pu entendre un traître mot. Immense est la basilique, et comme la nef était occupée par les autorités constituées, j’ai dû chercher un refuge dans les petites nefs des côtés de l’église. Là, inondation de femmes sur toute la ligne. Derrière un confessionnal, j’ai trouvé une vieille chaise dont trois pieds tenaient à peine et le quatrième pas du tout. Du reste, je n’ai pas le droit de me plaindre, car on ne m’a pas fait payer les deux sous réglementaires. J’ai entendu vaguement le chant des hymnes dans le chœur, mais le prédicateur, point. Il paraît que je