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POÉSIES DES DAMES DES ROCHES.

Sourdrai, Poitevin, donna un peu plus tard, chez Abel l’Angelier, à Paris, une édition in-4o des mêmes pièces, avec ce titre : La Puce de madame Des Roches, qui est un Recueil de divers poëmes grecs, latins et françois, composés par plusieurs doctes personnages, Paris, 1583.

La mère et la fille étaient alors en pleine célébrité. Leur talent et leur grâce l’avaient commencée, le petit événement tant chanté avait fait le reste. Auparavant elles avaient semblé craindre de courir les chances d’une publication ; depuis, elles s’y étaient hardiment livrées. On vit paraître : Les premières œuvres de Mesdames Des Roches, de Poitiers, mère et fille, dont une seconde puis une troisième édition ne se firent pas attendre, celle-ci augmentée de six dialogues avec une tragi-comédie de Tobie et autres œuvres[1]. Elles avaient encore d’autres écrits en réserve, que Lacroix du Maine vantait bien haut par avance. « Ces deux dames, disait-il, sont tellement savantes et ont si grande connoissance de toutes bonnes lettres que (oultre le temoignage qu’en ont donné par escript les plus doctes de France) leurs escripts en sont les seuls vrais et fidèles témoins, tant de ce qui a été imprimé à Paris et autres lieux que ce qu’ils n’ont encore mis sur la presse, composé par elles et en prose et en vers, sur plusieurs divers sujets. » Il finissait par dire : « Elles florissent à Poitiers cette année 1584[2]. » Deux ans après, elles publièrent leurs missives, avec le ravissement de Proserpine, prins du latin de Claudian et autres imitations et meslanges poétiques, Paris, Abel l’Angelier, 1586, in-4o. Puis le silence se fit autour des deux muses. La mort les avait visitées le même jour.

En 1587, la peste désolait Poitiers, Madeleine Des Roches succomba la première, et sa fille la suivit peu d’heures après[3] ; fin touchante, par laquelle sembla se continuer dans la tombe une union dont rien, tant qu’elles avaient vécu, n’avait rompu ni même altéré la sympathie. La mère, qui était savante, comme une femme pouvait l’être alors, en toutes sortes de langues, même en latin et en grec, s’était elle-même occupée de l’éducation de sa fille ; elle y avait mis tous les soins de son esprit et de son cœur, et ce ne fut pas son moins parfait ouvrage.

Madeleine, qui par le doux exercice de son affection de mère, s’était pu livrer à l’un des plus chers sentiments du cœur des femmes, a répandu dans ses vers une douceur et une tendresse qui ne se trou

  1. Viollet-le-Duc, Bibliothèque poétique, p. 292.
  2. Lacroix du Maine, Bibliothèque françoise, art. Madeleine des Roches.
  3. Dreux Du Radier, Bibliothèque historique et critique du Poitou. 1751, in-12, tom. II, p. 438.