Page:Crépet - Les Poëtes français, t2, 1861.djvu/497

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Blâmer la rigueur de ses armes,
Tout ce bruit n’est point entendu.
Pour nos plaintes et pour nos larmes,
Pour nos cris et pour nos vacarmes,
On ne voit rien qu’elle ait rendu.

Nous autres faiseurs de chansons,
De Phébus sacrés nourrissons,
« Peu prisés au siècle où nous sommes, »
Saurions bien mieux vendre nos sons,
S’ils faisaient revivre les hommes
Comme ils font revivre les noms.
Nous eussions appris votre gloire
A toute la postérité,
Et consacré votre mémoire
Au temple de l’éternité.
Mais de nos œuvres magnifiques,
De nos airs et de nos cantiques.
Seigneur, vous n’eussiez rien ouï,
L’air et le ciel, la terre et l’onde,
Et tout ce qui se fait au monde
Était pour vous évanoui.

Commencez doncques à songer
Qu’il importe d’être et de vivre,
Pensez mieux à vous ménager ;
Quel charme a pour vous le danger.
Que vous aimiez tant à le suivre ?
Si vous aviez dans les combats
D’Amadis l’armure enchantée,
Comme vous en avez le bras
Et la vaillance tant vantée ;
De votre ardeur précipitée ,
Seigneur, je ne me plaindrais pas.
Mais en nos siècles où les charmes
Ne font pas de pareilles armes.