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SOUVENIRS

cution que je lui fis subir. Ce qui suit n’aura l’air de rien, mais ce sera toujours par de semblables choses, et par de petites choses, que je pourrai vous faire connaître ce grand personnage.

Émilie nous parlait assez souvent de la bonne mine et du grand air de ses armoiries, qui sont au contraire d’une vulgarité désolante. — Mais, je n’ai jamais su, lui dit notre tante (la dédaigneuse et la peureuse), ce que pouvaient signifier tous ces barillets qui sont devenus les armes de Breteuil ? — Madame, ils sont disposés, ce qui s’appelle en traînée, répondit Mme du Châtelet avec un ton d’outrecuidance inconcevable, ainsi vous devez bien penser que ce sont des barils de poudre… — J’aimerais mieux vous entendre dire que ce fussent des barils de… (tout ce qu’il y a de plus sale)… — Et pourquoi donc, s’il vous plaît ? me dit-elle avec un air étonné ? — C’est bien autrement ancien que la poudre à canon, dont l’origine ne remonte pas à l’année 1399, et qui, par conséquent, ne saurait être présentable à Versailles : je ne sais comment vous n’avez pas calculé ceci ? Elle se mit à réfléchir, à nombrer, à supputer par les dates, et partant de là, nous n’avons jamais eu l’ennui de l’entendre reparler de ses armes de Breteuil.

Mlle de Biron fut épousée, malgré qu’elle en eut, par le Comte de Bonnac, et bientôt après, Mlle de Villeroy devint la femme du Marquis d’Harcourt, qui faillit en mourir de chagrin, parce qu’il adorait Mlle de Biron et qu’il en était payé d’un parfait retour. Tout le monde y prit part, en s’irritant contre deux actes de violence aussi dénaturée, et