Aller au contenu

Page:Créquy - Souvenirs, tome 4.djvu/164

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
160
SOUVENIRS

cité de la France et la paix du monde ; mais on pressentait que ce serait le parfait bonheur, et qu’on n’en jouirait pas. Les sujets, et peut-être la famille du Roi son père, avaient provoqué des châtimens terribles ; aussi, disions-nous toujours tristement que la France et les Français du dix-huitième siècle n’étaient pas dignes d’être gouvernés par le Dauphin Louis IX.

En jouant avec un fusil de chasse, il avait eu le malheur de blesser un de ses Écuyers, M. de Chambors, lequel en mourut six jours après, par suite de la gangrène et de l’extrême chaleur, car cette blessure avait été des plus légères ; il laissait une jeune femme qu’il adorait et dont il était aimé tendrement ; mais l’affliction qu’en éprouva M. le Dauphin fut désespérée, et le Roi lui-même y compatit si généreusement qu’il en fit constituer pour la veuve et les enfans de M. de Chambors une rente de vingt-cinq mille francs sur le domaine de la Couronne. Se trouvant sur le point d’accoucher à l’époque de ce malheur, Mme de Chambors écrivit à M. le Dauphin, pour lui recommander son enfant en cas de mort pour elle et voici la réponse de son Altesse Royale :


Versailles, 30 février 1756.

« Vos intérêts, Madame, et ceux de votre famille sont devenus les miens. Je correspondrai toujours à tout ce que vous pourrez désirer pour un enfant que j’ai privé de son père. Je serais nâvré que vous crussiez nécessaire de vous adresser à tout autre qu’à moi ; sur qui pourriez-vous compter avec plus de justice et d’assurance, après