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SOUVENIRS

naire avant de l’envoyer à l’échafaud, elle était assistée de sa porte-crosse, appelée Mme de Surbeck. — Citoyens, disait cette religieuse à tous les tigres de cette caverne, comment voudriez vous que Madame Notre Mère pût répondre à ce que vous lui dites ; elle est restée sept mois dans un cachot à Saint Lazare, elle en est devenue sourde…

— Écrivez, citoyen greffier, dit le représentant Barrère, chef des jurés et surnommé l’Anacréon de la guillotine, écrivez que la ci-devant abbesse de Montmartre a conspiré sourdement.

Mme de Surbeck accompagna son Abbesse et suivit la charrette à pied jusque sur la place de Louis XV ; elle se mit à genoux au bas de l’échafaud pour lui demander sa bénédiction, que Mme de Montmartre lui donna tout aussi paisiblement et solennellement que si la chose avait encore eu lieu dans le sanctuaire de son abbaye royale. — Va-t-en donc te cacher, béguine, lui dit le bourreau, va-t’en donc ! Si ce n’était pas moi qui suis de Montmartre et qui suis de service aujourd’hui sur la place de la Révolution, tu n’irais pas coucher chez toi !…

Son chez-elle était notre prison, la malheureuse ! et c’est là qu’elle revint trouver son lit et son bréviaire après l’exécution de sa supérieure. Elle était la tante de l’officier des cent-suisses du même nom qui fut tué dans la chapelle des Tuileries, le 10 aout. Il y a longtemps que ce nom de Surbeck est inscrit dans les annales de la fidélité courageuse, et le Roi François Premier avait un Page appelé François de Surbeck, dont l’héroïsme est assez connu.

Cette bonne Vendéenne qu’on nous avait ad-