Page:Crevel - Êtes-vous fous?, 1929.djvu/184

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Puis c’est le défilé des mannequins.

D’abord l’éonisme à sa naissance, imparfait, tel que le représente un premier jeune homme habillé normalement, mais coiffé d’un béret de satin bleu, avec une petite plume rose, comme une guiche sur sa joue plâtrée. Le suivant porte un pantalon court très juponné, grâce à quoi paraît d’autant plus piteuse une jambe de coq, gainée dans un bas de soie noire. Le troisième drape sur un raglan misérable une étole en peau de lapin pelée. Quant au quatrième, mains d’étrangleur, nuque de boucher, il tombe la veste, le pantalon, émerge tous volants, soies et dentelles, chemise en crêpe de Chine, soutien-gorge de tulle à faveurs mauves et incroyables sur un torse de lutteur.

Et maintenant, le morceau de résistance : une grosse dame timide qui s’avance et, de sa plus douce voix, avoue qu’elle est un ancien uhlan. Il avait toujours aimé s’habiller en femme, et, après la guerre, pour mieux aller avec ses robes s’est fait castrer. Le dernier poil de sa barbe tombe, son corps engraissé,