Page:Crevel - Êtes-vous fous?, 1929.djvu/84

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Tandis que Rachel scande son boniment à coups de cravache sur le sol, Camille fredonne tout bas, rien que pour soi, la chanson des tireurs de nattes :


Pique puce
Mes pucelles
Mon prépuce
À du sel
Pour la celle
Sans puce.


Elle s’effraie, rien qu’à prononcer le mot prépuce depuis que, par la plus maléfique magie des syllabes satinées, son cocher de père s’est fracassé le crâne contre une bordure de trottoir. Mais la nuit, quand Rachel dort, elle se lève, pour aller, en cachette, au cri de pique-puce, chatouiller avec une pointe d’aiguille ou d’épingle la ménagerie de sa marraine.

Elle s’en donne avant, pendant, après, car, recouchée, rendormie, elle savoure un songe qui, mêlant peur et remords, est meilleur que le citron pour qui aime à grincer des dents.