Page:Crevel - Êtes-vous fous?, 1929.djvu/86

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

tête incassable, fait voler en éclats le verre protecteur. Alors le bétail verni se précipite, déchiquète ce corps de douce paraffine, s’enivre de son sang plus et mieux parfumé qu’eau dentifrice, et, bien qu’on soit en plein noir, un soleil subit éclate, astre et nuage à la fois, puisque son feu soudain métamorphosé en grêle de poignards, les plus inexorables lames flamboient et convergent jusqu’à la cible de velours violet, dont le lambeau misérable et sanglant, bientôt dans la nuit éteinte, vide, sera, de l’univers entier l’unique, l’ultime vestige.



Chaque matin, la dompteuse trouve des cadavres, des estropiées. Les survivantes, accablées par les deuils et les pressentiments, perdent toute verve, tout entrain. Un soir, la dernière rescapée du corps de ballet, à elle seule essaie encore une danse, Rachel a beau lui chantonner Coppélia, son air favori, la pauvre n’a plus de cœur aux jambes. Elle sait qu’elle sera morte à l’aube prochaine, assassinée par