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LIVRES I-IV 281

l'œuvre d'un continuateur. Leurs caractères propres témoignent également de cette origine ; c'est une poésie élégante, facile, qui a de la grâce et de la vie, mais qui manque de force et de concision. Les comparaisons y sont rares et pauvres. Le don du pathétique, qui est si remarquable chez le poète des livres V, VI et VII, fait presque défaut à l'auteur de ceux-ci. Il peint des situations touchantes sans nous toucher réellement. Si l'auteur des chants primitifs de V Odyssée axsiii eu l'intention de donnera ses récits une introduction de cette sorte, il est hors de doute qu'il l'eût faite bien plus courte et par là même bien plus émouvante. Sa grande imagination, voulant peindre l'audace des prétendants et le pillage des richesses d'Ulysse accompli sous les yeux de son fils, lui aurait fourni sans peine des traits bien autrement énergiques et originaux. Nous concluons de là sans hésiter que ces quatre livres sont une addition aux chants primitifs. Mais d'un autre côté nous nous refusons à croire qu'ils aient eu jamais une existence indépendante. L'idée d'une Télémachie, d'abord dis- tincte de VOdyssée, et plus tard réunie à ce poème, doit être absolument écartée. Quoi qu'on puisse dire, il n'y a pas matière à une série de récits indépen- dants dans ces quatre livres, par la raison qu'il n'y a pas d'action. Ce n'en est pas une qu'un voyage dont le principal acteur se borne à écouter ce qu'on lui dit. Les quatre premiers livres n'ont donc pu être composés que pour tenir la place qu'ils occupent'.

1. Kirchhoff (Odyssée^ IV, 619, note) suppose que les quatre premiers livres se reliaient primitivcmcut au livre XV et qu'ils constituaient ensemble un récit qui a été plus tard disloque et dont quelques parties seulement sout entrées dans Y Odyssée. L'hy- potbèse est compliquée, mais elle n'améliore en rien l'opinion que nous combattons ici.

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