Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t1.djvu/595

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voilà ce que nous devons essayer d'indiquer brièvement*.

Et d'abord quelle est, pour ainsi dire, la loi intime qui règle ce défilé des dieux ? Il n'y en a qu'une, qui est l'ordre même des temps. D'âge en âge, en suivant le poète, nous portons nos regards des aines aux plus jeunes. Seulement, dans ces générations si denses, où d'un même père et d'une même mère naît parfois tout un groupe de dieux, quand tous les frères ont été d'abord nommés simultanément, chacun d'eux reparait à son tour comme chef de famille : confondu tout à l'heure avec ceux de son âge, il revient maintenant séparé d'eux, mais entouré de sa descendance. Les frères se succèdent ainsi, jusqu'à l'épuisement de leur génération. Derrière chaque chef marche toute une phalange divine, ici les enfants de la Nuit, plus loin les fils et filles de Thaumas ou de Phorcys, d'autres ensuite et encore d'autres, troupes nombreuses, qui se pressent sans jamais se confondre. Le principe qui domine l'ensemble domine aussi les parties : chacun de ces groupes se divise à son tour, et toujours selon le même mode. Une apparente dérogation à la loi commune nous frappe-t-elle ? Regardons plus attentivement; presque toujours la raison d'abord cachée nous apparaîtra. Ce groupe qui ne semblait pas à sa

1. La Théogonie a été analysée en détail, d'une manière explicative et critique, par Schœmaun : tout le second volume de ses Opuscules est consacré à ce poème. Voir aussi l'analyse de Bergk, dans son Hist. de la littér. gr.y et les ouvrages cités par nous dans les notes de ce chapitre. On trouvera un tableau analytique de la Théogonie dans l'atlas (p. 8 et 9) que M. Bouciié-Lcclercq a joint à sa traduction de Y Hist. grecque de Curtius. En France, il faut mentionner le travail de J.-D. Guigniaut, De la Théogonie d'Hésiode^ Paris, 1835, et un chapitre déjà cité du livre de M. J. Girard sur le Sentiment religieux en Grèce (1. I, ch. ii).