mille ou quinze cents. On comprend qu’Athènes, grande ville commerciale, centre d’un empire maritime important, eut beaucoup de procès à juger. Affaires civiles et criminelles, affaires publiques et privées, affaires des citoyens et des sujets viennent devant les Héliastes ; la politique même leur appartient en quelque mesure, par les procès qu’elle suscite, et notamment par l’accusation d’illégalité (γραφὴ παρανὸμων), si fréquente et si redoutée[1]. Un quart des citoyens passe son temps a juger. Athènes n’est plus, pour les poètes comiques, la ville « couronnée de violettes » (ἰστέφανος) ; elle est la ville des juges. Quand le disciple de Socrate, dans les Nuées, montre à Strepsiade une carte géographique et, sur cette carte, Athènes, Strepsiade lui répond : « Qu’est-ce que tu me chantes ? Je n’en crois rien ; je ne vois pas de juges en train de siéger[2]. »
Nous n’avons pas à examiner ce que valait la justice des Héliastes ; mais, au point de vue de l’art oratoire, leur influence fut considérable et des plus heureuses. Le nombre même des Héliastes favorisait l’éloquence : un tribunal de mille membres, c’est encore le peuple ; c’est une foule, bien que triée ; une foule avec la sincérité de ses impressions et la largeur de son goût ; il n’y a pas à craindre que les procès civils engendrent une manière de parler pédantesquement juridique. Ces juges, d’ailleurs, sont moins des magistrats, au sens moderne du mot, que des jurés ; comme tous les jurés, les Héliastes sont accessibles à l’éloquence, et en même temps ils s’en défient, ce qui oblige celle-ci à ne pas s’étaler indiscrètement : double profit pour l’orateur. En outre, la loi ordonnait que chaque