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Hippias d’Élis et Polos d’Agrigente[1] ne valent pas Prodicos : le travers sophistique est beaucoup plus marqué chez tous deux. — Hippias est à peu près du même âge que Socrate[2]. Il a des prétentions encyclopédiques. Non seulement il parle sur tout, sur le ciel et sur les astres, sur la géométrie et l’arithmétique, sur les syllabes, les rythmes et les mélodies, sur les généalogies des héros sur les fondations des villes, sur la vertu[3], mais encore il fait lui-même ses vêtements et jusqu’à ses souliers[4] : c’est un homme universel. Avec cela, orateur redondant et fleuri, dix fois plus riche en mots qu’en idées[5]. Au total personnages assez vide et assez vain. — Polos, disciple de Gorgias, avait fait un ouvrage sur la rhétorique[6]. Il y recommandait les gentillesses du langage (μουσεῖα λόγων, dit Platon), redoublement d’expression, sentences, images, etc., et pratiquait cet art pour son propre compte[7] — Mentionnons encore, pour en finir avec ce groupe, Likymnios, élève de Polos[8].

Un autre personnages assez curieux est Stésimbrote de Thasos, plus âgé que les précédents et un peu à part dans sa génération. Contemporain de Périclès et de l’homme d’état Thucydide, Stésimbrote de Thasos fut bien un sophiste, car il donnait des leçons à prix d’argent[9]. Mais il ne s’occupait pas de rhétorique. Il

  1. Notices dans Suidas.
  2. Protagoras, p. 317 C ; Apologie 19, E. Cf. Xénophon, Mémor., IV, 4, 5. — Sur Hippias, voir une étude de Otto Apelt, Beiträge sur Gesch. d. Griech. Philos. (Leipzig, 1891), p. 36-393.
  3. Hippias maj., p. 285 B. Cf. 285 B. Cf. 286, A-B (début de son discours sur la vertu).
  4. Hippias min., p. 368, B.
  5. Voir l’imitation de Platon dans le Protagoras, p. 337 C (et la suite).
  6. Cf. Gorgias, p. 452 ; Phèdre, p. 267 C, et les scholiastes sur ces passages.
  7. Voir l’imitation qu’en fait Platon dans le Gorgias, p. 448, C.
  8. Phèdre, loc. cit.
  9. Xénophon, Banq., 3, 6.