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CHAPITRE II. — D’AUGUSTE À DOMITIEN

de cet enseignement sans nouveauté, une tentative originale, curieuse et féconde doit attirer notre attention : c’est celle du juif alexandrin Philon, qui peut être considéré comme le prédécesseur du néoplatonisme.

La communauté juive d’Alexandrie, nombreuse, active, intelligente, et depuis longtemps hellénisée, n’avait pas pu rester étrangère à la philosophie grecque, régnait partout et sans laquelle il n’y avait pas alors de culture classique[1]. Il a été question plus haut du péripatéticien juif Aristobule, qui, au second siècle, prétendait retrouver dans les doctrines du Lycée une émanation de la sagesse de Moïse et des prophètes. Les documents nous manquent pour suivre le développement, ou tout au moins la transmission, de ces idées dans les écoles juives d’Alexandrie jusqu’au commencement de notre ère ; mais nous ne pouvons pas douter qu’elles ne s’y soient perpétuées, puisque nous les retrouvons chez Philon, qui les traite comme des vérités admises. C’était donc, à n’en pas douter, une opinion déjà ancienne et commune chez les juifs hellénisants d’Alexandrie au temps d’Auguste, que la sagesse grecque ne différait pas essentiellement de la sagesse hébraïque, c’est-à-dire, suivant eux, de la révélation contenue dans les livres saints, qu’elle en était même certainement issue, et qu’elle pouvait en être considérée comme une sorte de commentaire, grâce auquel les données de la révélation étaient mises à la portée de l’intelligence humaine. Toute l’œuvre de Philon procède de là.

Né, vers l’an 20 avant notre ère, d’une famille sa-

    écrits de Platon en tétralogies. Nommons aussi Ammonios d’Alexandrie, qui vécut et professa à Athènes sous les règnes de Néron et de Vespasien : il y fut le maître de Plutarque, qui l’a souvent mis en scène dans ses dialogues.

  1. L’ouvrage le plus riche d’informations sur l’état du judaïsme en ce temps est celui de Schürer, Geschichte des jüdischen Volkes im Zeitalter Jesu Christi, 2 vol., 1886.