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LE COFFRET DE SANTAL


Esclaves, hâtez la marche endormante
Des troupeaux. L’agneau sait téter alors
Que la brebis court en broutant la menthe.
De vos aiguillons piquez les bœufs forts,
Les bœufs paresseux que le taon tourmente.

Mais on ralentit l’allure, à travers
Les bois ; on descend de cheval ; et, blanches,
Nos filles s’en vont dans les buissons verts,
Les cheveux au vent, écartant les branches,
Cherchant avec nous des chemins ouverts.

Posant leurs pieds blancs sur les feuilles sèches,
Elles font tinter autour de leurs cous
Et sur leurs beaux seins, doux comme les pêches,
L’or et l’argent fins, sonores bijoux.
Ainsi nous marchons dans les forêts fraîches.

Voici l’aube. Allons ! Assez de sommeil !
N’attendons pas ceux qui sont lents à suivre,
Voici que le jour s’est levé vermeil.
Nous vaincrons les nains d’ébène ou de cuivre
Dans les beaux pays chauffés du soleil.

Et les nains, sachant nos cœurs indomptables,
Seront conducteurs et graisseurs tremblants