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LE COFFRET DE SANTAL

Ces vieux quais oubliés sur leurs pierres disjointes
Supportent des maisons grises aux toits en pointes.
Là, sèchent des chiffons que de leurs maigres bras
Les femmes pauvres ont rincés. En bas, des rats.

Le flot profond, serré par les piles massives
Du pont, court plus féroce, et les pierres passives
Se laissent émietter par l’eau, tranquillement.
On voit s’allumer moins d’astres au firmament
Que de lumières sur les quais et dans les rues
Pleines du bruit des voix, des bals gais, parcourues
Par les voitures.
                          Seul, le Fleuve ne rit pas
Sous les chalands ventrus et lourds. D’ailleurs, en bas,
L’égout vomit l’eau noire aux affreuses écumes,
Roulant des vieux souliers, des débris de légumes,
Des chiens, des chats pourris qu’emmène le courant.
Souillure sans effet dans le Fleuve si grand
Dont la lune, œil d’argent, paillette la surface.
Mais, qu’importe la vie humaine à l’eau qui passe,
Les ordures, la foule immense et les bals gais ?
L’eau ne s’attarde pas à ces choses.
                                                      Les gués
Sont rompus, maintenant, en aval de la ville.
L’homme a dragué le lit du Fleuve, plus docile
Depuis qu’il est si large et si profond.