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ÉLECTRICITÉ POLAIRE.

cristal ramené à l’état neutre, si on le décomprime, le phénomène se reproduit, mais avec une inversion des signes ; l’extrémité qui se chargeait positivement par compression devient négative pendant la décompression, et réciproquement[1].

Pour faire une expérience, on taille deux faces parallèles entre elles et perpendiculaires à un axe d’hémiédrie dans la substance que l’on veut étudier ; on les revêt de deux feuilles d’étain qu’on isole extérieurement par deux plaques en caoutchouc durci ; le tout étant placé entre les mâchoires d’un étau, par exemple, on peut exercer des pressions sur les deux faces taillées, c’est-à-dire suivant l’axe d’hémiédrie lui-même. Pour constater l’électricité, nous nous sommes servis d’un électromètre Thomson. On peut montrer la différence de tension des extrémités en mettant chaque feuille d’étain en communication avec deux des couples de secteurs de l’instrument, l’aiguille étant chargée d’une électricité connue. On peut aussi recueillir séparément chacune des électricités ; il suffit pour cela de mettre une des feuilles d’étain en communication avec la terre, l’autre étant en communication avec l’aiguille et les deux couples de secteurs étant chargés à l’aide d’une pile.

Quoique n’ayant pas encore abordé l’étude des lois qui régissent le phénomène, nous pouvons dire qu’il présente des caractères identiques à ceux de la pyroélectricité tels que les a définis Gaugain dans son beau travail sur la tourmaline.


2. Nous avons fait l’étude comparée des deux modes de développement d’électricité polaire sur une série de substances non conductrices, hémièdres à faces inclinées, qui comprend à peu près toutes celles qui sont connues comme pyroélectriques[2].

  1. Les cristaux hémièdres à faces inclinées sont les seuls cristaux pyroélectriques ; ce sont aussi les seuls capables d’acquérir l’électricité polaire par pression. Certains cristaux holoèdres, comme le spath, se chargent bien par pression, mais d’une seule électricité ; c’est là un phénomène de surface, entièrement différent, et dont l’effet était insensible dans les conditions de nos expériences.
  2. On peut prévoir qu’il en existe beaucoup d’autres parmi les substances cristallisées artificielles. Les corps actifs sur la lumière polarisée, par exemple, fournissent des cristaux dont certains diamètres ont leurs extrémités dissemblables.