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V

KAZAN RENCONTRE LOUVE GRISE

Assis sur son derrière, Kazan, après avoir jeté son cri lointain, se mit à renifler dans l’air la liberté qui maintenant était la sienne. Autour de lui s’évanouissaient, avec l’aurore, les abîmes de nuit de la forêt.

Depuis le jour où tout là-bas, sur les bords du Mackenzie[1], il avait été, par des marchands qui trafiquaient dans ces parages, acheté aux Indiens et, pour la première fois, attelé aux harnais d’un traîneau, il avait souvent, en un désir ardent, songé à cette liberté vers laquelle le repoussait le sang de loup qui était en lui. Jamais il n’avait complètement osé. Maintenant que c’était fait, il en était tout désorienté.

Le soleil était complètement levé, quand il arriva au bord d’un marais, calme et gelé, qui occupait une dépression entre deux chaînes de montagne. Le sapin et le cèdre poussaient drus sur ses bords, si drus que la neige avait à peine traversé leurs ramures et que la lumière s’y tamisait au point de n’être plus qu’un crépuscule.

  1. Le fleuve Mackenzie prend sa source dans les Montagnes Rocheuses, traverse le Canada vers l’ouest et va se jeter dans la Mer Glaciale du Nord, après avoir côtoyé les Grands Lacs de l’Ours et de l’Esclave.