Page:Cuvier - Recueil des éloges historiques vol 1.djvu/463

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d'intrigue et de troubles. On ne peut mieux se représenter ces agitations continuelles que par le récit d’un événement que M. Pallas rapporte en détail, et qui peut même nous donner une idée de ces fameuses migrations des peuples qui forment dans l’histoire de l’Europe une époque si remarquable.

Une peuplade tout entière qui, lors des conquêtes du dernier empereur de la Chine, Kien-Long, s’était réfugiée sur le territoire russe, et que l’on avait établie, en 1758, dans les landes du pays d’Astracan, ayant éprouvé quelques mécontentements, et déterminée d’ailleurs par les intrigues de son principal Lama, résolut, douze ans après, de retourner dans les pays soumis à la Chine. Les préparatifs durèrent plusieurs mois sans que personne violât le secret. Enfin, à un jour fixe au commencement de 1771, toute la nation, hommes, femmes et enfants, au nombre de plus de 60,000 familles, émigra en trois divisions, emmenant leurs tentes, leurs troupeaux et tous leurs bagages, et enlevant tout ce qu’ils trouvèrent sur leur route d’hommes et de richesses : ils tirent ainsi plus de 500 lieues sans que les troupes qu’on envoya, après eux, ni les rivières, ni les attaques des peuplades intermédiaires, ni la mortalité de leurs gens et de leurs animaux, pussent les arrêter. Rien de semblable n’était arrivé depuis la fuite des enfants d’Israël hors d’Égypte.

M. Pallas ne traite pas seulement de l'origine et des caractères physiques de ces peuples, de leurs mœurs et de leur gouvernement ; une grande partie de son ouvrage est consacrée à l’exposition de leur re-