Page:D’Alembert - Œuvres complètes, éd. Belin, IV.djvu/278

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autres, envieux dit plus que jaloux. Le premier marque une disposition habituelle et de caractère ; l’autre peut désigner un sentiment passager : le premier désigne un sentiment actuel plus fort que le second. On peut être quelquefois jaloux, sans être naturellement envieux : la jalousie, surtout au premier mouvement, est un sentiment dont on a quelquefois peine à se défendre ; l’envie est un sentiment bas, qui ronge et tourmente celui qui en est pénétré.

évader (s’), échapper (s’), enfuir (s’).

Ces mots diffèrent, en ce que s’évader se fait en secret, s’échapper suppose qu’on a déjà été pris ou qu’on est près de l’être, s’enfuir ne suppose aucune de ces conditions.

On s’évade d’une prison, on s’échappe des mains de quelqu’un, on s’enfuit après une bataille perdue.

fidélité, constance.

La fidélité suppose un engagement ; la constance n’en suppose point : on est fidèle à sa parole, et constant dans ses goûts.

Par la même raison, on dit fidèle en amour et constant en amitié ; parce que l’amour semble un engagement plus vif que l’amitié pure et simple.

Par la même raison encore, on dit, un amant malheureux et fidèle, un amant malheureux et constant ; parce que le premier est engagé, et que l’autre ne l’est pas.

Il semble que la fidélité tienne plus aux procédés, et la constance au sentiment. Un amant peut être constant sans être fidèle, si en aimant toujours sa maîtresse, il ne laisse pas d’avoir des passades ; et il peut être fidèle sans être constant, s’il cesse d’aimer sa maîtresse, sans néanmoins en prendre une autre : la fidélité suppose une espèce de dépendance ; un sujet fidèle, un domestique fidèle, un chien fidèle.

La constance suppose une sorte d’opiniâtreté et de courage. Constant dans le travail, dans les malheurs. La fidélité des martyrs à la religion a produit leur constance dans les tourmens.

humeur, fantaisie, caprice.

Ces trois mots désignent en général un sentiment vif et passager dont nous sommes affectés sans sujet ; avec cette différence, que caprice et humeur tiennent plus au caractère, et fantaisie aux circonstances, ou à un état qui ne dure pas, et qu’humeur emporte outre cela avec lui une idée de tristesse. Une coquette a des caprices ; un hypocondre, un misanthrope, ont de l’hum-