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LE ROI

Il partit, l’étendard claquant, fier, joyeux, rigide sur son bai, le poil en révolte, sans casque, suivi par dix-huit cents hommes fascinés, le glaive en une main, pistolet de l’autre et poignard aux dents qui bramaient de mort et d’amour ! L’escadron royal enfonça la troupe d’Egmont dans un bruit qui passa sur Dreux. « Bucheronnez ! s’écriait le roi, l’ennemi déjà se désordonne ! Eau trouble, gain du pécheur ! » Il reçut une balle dans le haut du bras, ses yeux de basilic incendièrent l’homme qui avait tiré : « Que les fièvres quartaines te convulsent ! » Il dressa le drapeau dans l’air funèbre chargé de balles et tua l’homme, « Plus avant ! bravait-il sans cesse. Droit à ces gendarmes wallons qui n’ont plus que lances brisées ! Je suis chef ; croyez-en l’aboi d’un vieux chien : le champ est à nous ! » Son cheval rouait au milieu des glaives et balançait l’étendard que le vent gonflait de grâces subites. « Avancez ensemble, aumoureux ! À ma cornette ! » Les Wallons rompus et les Espagnols trop meurtris pour avoir le temps d’une recharge n’opposèrent plus que l’épée aux quinze cents pistolets de Biron. La poudre, en cet endroit, fit faire maintes grimaces et coiffa plusieurs capitaines de cagoules rouges, « Aux mains ! gasconnwit une voix ; six Senors et quatre Espagnols sont dix diables ! chantez-leur le romancero ! » Retournant aux Wallons à grands coups d’épée : « Le proverbe ne pourra plus dire qu’on s’en va en Flandres sans coutelas ! » Cimenté à son poing, le drapeau se tordait au-