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LE ROI

de bons champs : vous m’en tirerez des conquêtes qu’en mon âge mûr ma pensée assagie marque pour certaines. Devenez laboureurs, soldats ! n’en soyez point tristes, et livrons aux campagnes un long combat enchanté ! Une fois posés dans vos fermes, oubliez vos reins courbattus, reprenez la herse des aïeux et retravaillez au bonheur du peuple dont vous commençâtes la gloire ! Maisons d’industries, de commerce, entreprises de bâtiments, terrains agricoles, vous aurez tout cela de moi qui vous aime. (Il regarda les seigneurs) Et ce n’est point tout : S’il me faut des mains, me faudra aussi quelques tètes pour tracer des routes, et m’édifier en bonnes phrases une littérature rurale qui nous enseigne le sol, car nous avons trop lu de Bibles, et trois onces de pain bénit n’ont jamais restauré un homme. (Il sourit) Y eut des rois qui comptaient pour deux la gloire et la paix, je pense autrement. Que me sert qu’Ulysse soit plus âgé que Patrocle ? Que sert de peser un mot quand y a le fait ? J’aime les choses utiles, et il n’est qu’une gloire : être heureux ! Vous l’êtes dès ce jour. Plus de sang ; essuyez vos barbes et dites que vous avez assez bu. La France n’est point la belle d’autrefois, les guerres l’ont harassée ; mais à faible champ fort laboureur j’en veux faire dans l’avenir une nation riante et travaillante, avec un œillet sur chaque joue ! (À ce moment, le roi s’avança, la face enflammée, le poing haut) Braves compagnons de Coutras, d’Arques et d’Ivry ! soldats de l’Œuvre future !