Page:D’Haussonville - Souvenirs et mélanges.djvu/57

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

courre, presque aussi savant que la guerre. » Et là-dessus il répéta, d’une façon très-exacte et très-animée, tout ce qu’il venait d’apprendre l’instant d’auparavant. I[ lui échappa cependant quelques erreurs. Mon père les releva en riant. « Ah, monsieur d’Haussonville, vous êtes mon maître, mais pourquoi me trahissez-vous auprès du maréchal ? Avouez cependant que j’ai bien retenu vos leçons. » Cela était vrai. Mon père fut depuis invité à toutes les chasses ; l’Empereur le questionnait sur le mérite de ses piqueurs et de ses chiens ; mon père lui disait ce qu’il en pensait. « Dites donc cela à Berthier. » Mon père n’en faisait rien ; mais le grand Maréchal du palais Duroc, avec lequel il était lié, lui disait de temps en temps : « Vous devriez demander à l’Empereur de rétablir la grande-Louveterie. » Que cette idée vînt de Duroc ou de l’Empereur lui-même, mon père fit semblant de ne pas comprendre. Nommé chambellan sans l’avoir souhaité, presque à son corps défendant, il ne se sentait pour le nouveau régime et pour son chef aucun sentiment incompatible avec les obligations de sa charge, mais il ne se souciait pas de recevoir, encore moins de solliciter, une de ces faveurs personnelles qui imposent la reconnaissance et le dévouement comme un devoir. Mon père avait d’ailleurs plutôt du goût pour l’Empereur qui l’avait évidemment distingué parmi ses chambellans ; car il le faisait continuellement mettre de service hors de son