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sur leur famille. Ils ne réussirent que trop, dans leur funeste dessein.

Le frère cadet de Seng-houn-i, appelé Tsi-houn-i, témoignait surtout une haine violente contre la religion. Il employa tous les moyens pour décourager son aîné et le faire changer de résolution. Poussé à bout par ces persécutions domestiques qui se renouvelaient tous les jours, Seng-houn-i finit par céder. Il brûla ses livres de religion et fit un écrit pour se justifier devant le public d’avoir été chrétien.

Le père de Piek-i, homme d’un naturel emporté, n’avait jamais voulu entendre parler de la nouvelle doctrine. Il fit des efforts inouïs pour arracher la foi du cœur de son fils. Ne pouvant y réussir, il tomba dans le désespoir, et, un jour, se passa une corde autour du cou pour se donner la mort. Piek-i, ébranlé à la vue de semblables scènes, sentait son courage faiblir. Toutefois, il ne se rendait pas encore. Un chrétien, indigne de ce nom, vint près de lui pour achever de le perdre. Il y employa toutes les ruses, tous les mensonges imaginables, jusqu’à ce qu’enfin, fatigué de vexations, trompé par l’apostat, troublé par la vue et par les paroles de son père au désespoir, Piek-i céda. Reculant devant une apostasie manifeste, il usa de mots à double sens pour dissimuler sa foi. Son cœur avait défailli ; Dieu n’y avait plus la première place, et Dieu le rejetait, car il est écrit : celui qui aime son père ou sa mère plus que moi, n’est pas digne de moi. Depuis ce temps, circonvenu par ses proches et ses amis païens, il ne put avoir aucun rapport avec les chrétiens. Les relations coréennes racontent qu’il fut horriblement persécuté par les remords. Il devint morne, silencieux, mélancolique. Jour et nuit il versait des larmes, et souvent on l’entendait pousser des gémissements douloureux. Il ne pouvait plus se livrer au sommeil, il ne se dépouillait même plus de ses habits. S’il mangeait, c’était sans appétit, sans goût et sans profit pour son corps. Peu à peu cependant, les agitations de sa conscience se calmèrent ; les derniers efforts de la grâce se faisaient à peine sentir. Sa santé se rétablit, et on dit même que le désir des dignités pénétra dans son cœur. Quoi qu’il en soit, il n’eut le temps d’en posséder aucune. Au printemps de l’année pin-go (1786), il tomba malade de la peste qui sévissait alors (le io-ping des Chinois, espèce de typhus), et mourut à l’âge de trente-trois ans, après huit jours de maladie. Il a été impossible de savoir d’une manière certaine comment se passèrent ses derniers moments. On prétend que des chrétiens purent parvenir jusqu’à lui,