Page:Dallet - Histoire de l'Église de Corée, volume 1.djvu/273

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aller ? — Si tes parents ou le roi te pressaient, ne te rendrais-tu pas à leur voix ? À cette question je ne fis pas de réponse. — Pour toi, tu ne connais ni parents, ni roi. — Je connais très-bien et parents et roi. « 

Ici se termine le récit de Paul. On a remarqué qu’il ne répondit point à l’avant-dernière question : ce ne fut nullement par hésitation, mais pour ne pas blesser les usages de ce pays qui ne permettent pas une réponse négative quand le roi est mis en cause. Du reste, son silence fut très-bien compris des juges. Aussi le gouverneur lui fit donner dix autres coups ; ce qui faisait les trente coups fixés par la loi.

Après cela, Paul et Jacques furent ramenés et renfermés dans la prison. La nuit était déjà venue. À la suite de ces interrogatoires, le gouverneur envoya son rapport au roi.

Le roi de Corée était alors Tsieng Tsiong. Il était âgé de quarante ans, et il y avait quinze ans qu’il gouvernait le royaume. L’histoire le représente comme un prince sage, modéré, prudent, ami de la science et juste appréciateur du mérite de ses sujets. Il reçut le rapport du gouverneur, mais il ne paraissait nullement disposé à pousser les choses à l’extrémité. Cependant les ennemis de la religion chrétienne se montraient de plus en plus menaçants : de tous côtés arrivaient des adresses au roi, des pétitions aux ministres, demandant la punition des coupables et l’extirpation de cette nouvelle doctrine, qui renversait tous les fondements de la société. Plus de trente pièces de ce genre parurent du neuvième au douzième mois de cette année. Effrayé de ces manifestations, le premier ministre Tsaï, quoique loin d’être personnellement hostile aux chrétiens, entra dans les vues de leurs plus violents accusateurs, et pressa le roi de condamner Paul Ioun et Jacques Kouen à la peine capitale. Cette conduite surprit beaucoup de monde, car le ministre appartenait au parti Nam-in, aussi bien que les principaux d’entre les chrétiens, et de plus, il était lié par le sang ou l’amitié avec la plupart d’entre eux. Mais, la crainte de perdre son crédit et peut-être sa dignité, le désir de conserver sa fortune et celle de sa famille, le rendirent persécuteur. Nous verrons plus tard que la justice de Dieu le punit, dès cette vie, de sa lâcheté.

Cédant aux instances de son ministre, le roi consentit enfin à signer le décret qui condamnait Paul Ioun et Jacques Kouen à être décapités. Leurs têtes devaient être exposées en public pendant cinq jours, afin d’effrayer les populations voisines, et de les empêcher de suivre la nouvelle religion. Le décret, revêtu de la