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quelle pensée, relâcha immédiatement tous les apostats dont la prison regorgeait, et ne garda enchaînés que quatre chrétiens fidèles : Thomas T’soi, Pierre T’soi, Jean T’soi et Thomas Im. Les uns disent qu’on voulait les faire périr sous les coups, d’autres qu’on songeait à les envoyer en exil. En même temps, Sin Tai-hien-i fit cesser les arrestations ; mais les ennemis de la foi se concertèrent aussitôt, et, dans une adresse à la régente, demandèrent qu’on traitât les chrétiens en rebelles, et que le grand juge fût puni comme eux pour leur avoir montré trop d’indulgence. La régente furieuse destitua Sin Tai-hien-i, annula tous ses actes, ordonna de reprendre tous ceux qu’il avait mis en liberté, et fit transférer les quatre chrétiens à la prison du tribunal appelé Keum-pou.

D’après la loi coréenne, les dignitaires publics et les individus accusés de lèse-majesté ou de rébellion sont seuls justiciables du Keum-pou. Le tribunal des voleurs ne s’occupe que des délits contre la propriété. Pour les autres genres de délits, il y a le tribunal des crimes, auquel sont amenables non-seulement les gens du peuple, mais tous les nobles qui n’exercent aucune fonction publique. Les chrétiens avaient jusqu’alors été envoyés au tribunal des voleurs. Les transférer au Keum-pou, c’était les accuser de rébellion afin de pouvoir les punir en conséquence.

Tout d’abord, ainsi que nous l’avons remarqué, on n’avait saisi que des hommes du peuple ou de la classe moyenne. Le parti nouvellement au pouvoir essayait ses forces. Bientôt il se sentit assez puissant pour frapper un coup décisif, et le 9 de la deuxième lune, un mandat d’arrêt fut lancé avec toutes les formalités requises contre Ni Ka-hoan-i, ministre de second ordre, Jean Tieng Iak-iong, dignitaire du quatrième degré, Pierre Ni Seng-houn-i, ex-mandarin, et Luc Hong Nak-min-i, haut fonctionnaire. Ils furent tous les quatre conduits à la prison du Keum-pou. Le 11 de la même lune, Ambroise Kouen T’siel-sin-i et Augustin Tieng Iak-tsiong furent pris à leur tour. Le 14, François-Xaxier Hong Kio-man-i fut arrêté avec son fils Léon ; mais ce dernier fut envoyé à la prison de Po-tsien, ville où sa famille résidait.

On cherchait et on jetait en prison des néophytes de toutes conditions et de tout âge. On fit même venir à la capitale, pour y être jugés par le tribunal Keum-pou, les chrétiens détenus dans les villes de Nie-tsiou et de Iang-keun. Les allées et venues des satellites dans tous les quartiers ne discontinuaient ni jour ni nuit. Le Keum-pou, les deux divisions du tribunal des voleurs,