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Page:Dallet - Histoire de l'Église de Corée, volume 2.djvu/289

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le pays, ne permettaient pas de songer, pour le moment, à introduire l’évêque par Pien-men.

Ne pouvant suivre la voie de terre, Mgr Ferréol songea à pénétrer en Corée par mer ; mais l’expédition n’était pas moins périlleuse, car les côtes de ce pays sont gardées avec plus de jalousie encore que les frontières. Les pêcheurs coréens ne quittent pas le rivage pour s’aventurer en haute mer, et aucune relation de commerce n’existe entre les Chinois et les Coréens. Si la tempête jette une barque de l’un de ces peuples sur les rivages de l’autre, le capitaine et l’équipage naufragé sont conduits sous bonne escorte à la capitale, pour être remis entre les mains de leur gouvernement respectif ; avec cette différence cependant, qu’une jonque coréenne naufragée sur la côte chinoise sera sur-le-champ mise en pièces et livrée aux flammes, tandis qu’une jonque chinoise, dans un cas analogue, doit être réparée et remise à flot aux frais du gouvernement coréen. Ces difficultés ne découragèrent pas Mgr Ferréol, et il obtint des courriers coréens qu’on essayerait au moins d’introduire le diacre André Kim. Celui-ci, s’il avait le bonheur de pénétrer en Corée, devait chercher à établir des relations par mer avec la Chine, et venir lui-même sur une barque jusqu’à Chang-haï pour chercher son évêque.

« N’ayant plus rien qui me retînt à Pien-men, écrivait alors Mgr Ferréol, je m’en arrachai, le cœur rempli d’amertume ; mais je retrouvai bientôt ma tranquillité, en pensant que mon entrée dans la mission n’était pas, pour le moment, conforme à la volonté de Dieu, volonté qui doit nous être plus chère que la conversion du monde entier. Avant de quitter la frontière, je voulus voir défiler devant moi les mandarins et les soldats qui composaient la légation coréenne ; je ne pus me défendre de leur adresser intérieurement ces paroles : « Oh ! si vous saviez le don de Dieu, et quels sont ceux qui viennent à vous, loin de nous rejeter et de nous mettre à mort comme des malfaiteurs, vous nous recevriez à bras ouverts comme des envoyés du ciel. »

L’évêque donna à son diacre ses dernières instructions, le confia à la garde de Dieu, et en attendant le résultat de son aventureuse tentative, vint lui-même s’embarquer au Léao-tong pour retourner à Macao. Il avait une dernière lueur d’espérance. Les commandants des navires français avaient manifesté le désir d’aller en Corée ; s’ils accomplissaient ce projet, un missionnaire pourrait les accompagner et pénétrer enfin dans ce pays. En 1840, Mgr Ferréol avait employé cinq mois et demi pour se rendre de Macao en Tartarie ; son voyage de retour ne fut que de quinze