Page:Dante - L’Enfer, t. 2, trad. Rivarol, 1867.djvu/37

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foi était suspecte, Dante s’était trouvé à ce siége, comme on l’a dit au discours préliminaire.

[6] Le lecteur doit être prévenu que ce diable fait ici un mensonge aux deux voyageurs pour les égarer dans la vallée, comme on verra bientôt.

[7] Voici comment il faut entendre les paroles du texte. Ce diable dit mot à mot : « Hier, cinq heures plus tard que l’heure où nous sommes, nous avons compté douze cent soixante-six ans depuis la chute du pont. » C’est comme s’il disait : « Nous sommes aujourd’hui au samedi saint, et il est sept heures du matin ; cinq heures plus tard il serait midi ; hier donc, jour du vendredi saint, à midi (ou à la sixième heure, en comptant à la juive), il y a eu 1266 ans qu’un grand tremblement de terre fit tomber le pont. »

On sait que ce tremblement arriva à l’heure où Jésus-Christ fut mis en croix. Mais comme Dante date de l’incarnation, il faut ajouter 1266 ans les trente-quatre dont Jésus-Christ était âgé lorsqu’il mourut ; ce qui fait juste 1300 ans, époque du premier jubilé institué par Boniface VIII et de la descente de Dante aux enfers. Ce poëte a voulu y descendre le soir du vendredi saint, et y passer, comme Jésus-Christ, jusqu’au jour de Pâques.

[8] Virgile se trompait ; les diables ne faisaient tant de grimaces que pour se moquer entre eux de la crédulité des deux voyageurs. Le chef répond à ces grimaces par un pet, puisqu’il faut le dire. Dante rend ces diables fort ridicules, dans un siècle où la religion leur faisait jouer le plus grand rôle. Il faut croire d’ailleurs que le poëte avait eu de pareils tableaux sous les yeux, car le gouvernement populaire et les guerres civiles offrent souvent ce mélange d’horreurs et de sales bouffonneries.

Je me suis aperçu, au moment de l’impression, que quelques personnes n’avaient pas bien saisi la note 2 du chant III. Il faut qu’il y règne une métaphysique trop subtile puisqu’elle échappe aux prises de certai-