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INTRODUCTION.

dans son épître à Can Grande. Ainsi, la louve est certainement l’emblème de l’avarice en un sens général, et l’emblème de la Rome papale, qu’à diverses reprises, dans la suite, il caractérise par ce vice abject. Mais, comme nous l’avons expliqué, on chercherait vainement à dissiper les obscurités qui, sur ce point, enveloppent pour nous la pensée du Poëte. Il vaut mieux ne s’arrêter qu’à ce qui, dans son œuvre, éternellement vrai, montre la nature humaine telle qu’elle est, telle qu’elle fut, telle qu’elle sera toujours. Quelle étonnante variété de tableaux, quelle profondeur d’observation ! quelle vigueur de pinceau ! quel relief ! quelle vie ! Comme en quelques mots il sait dérouler tout un drame ou terrible ou tendre, susciter au fond de l’âme la complète vision de ce que n’a point exprimé la parole, ouvrir à l’œil interne des perspectives sans bornes !

Entrons avec lui dans le royaume sombre. Au-dessus des Limbes, séjour de ceux qui, avant Jésus-Christ, ayant vécu moralement bien, furent privés de la foi au Rédempteur à venir, est un lieu assigné pour demeure à cette race d’hommes dont le monde est plein, qui, par égoïsme ou par lâcheté, déserteurs du devoir, évitent de se commettre, cherchent un milieu entre le bien et le mal, sans autre souci que celui d’eux-mêmes, de leur repos, de leurs intérêts. Pour eux, rien de vrai, rien de faux, rien de juste, rien d’injuste, ou,