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INTRODUCTION.

au nom du Christ, sacré roi comme dans le prétoire de Pilate, siège effrontément l’athéisme.

Des mœurs analogues offrent aux yeux de tous, après la négation de la foi, la négation de la morale même. Les mystères orgiaques de la Rome païenne reparaissent dans la Rome papale. À la licence se joint l’ambition, une ambition que n’arrête aucune loi divine ni humaine. Des crimes inouïs épouvantent la terre. Pour remplir un trésor que la guerre, le luxe, les profusions d’une débauche effrénée vident sans cesse, on fatigue la patience des peuples et leur superstition, tant de fois mise à l’épreuve. Une réaction éclate. Successeur de Wiclef et de Jean Huss, Luther sépare de Rome la moitié de la chrétienté. Les bûchers s’allument, on y jette à milliers les rebelles. Mais on ne brûle pas la pensée, on n’étouffe pas la conscience dans les flammes. Le protestantisme survit à la persécution, se propage et grandit par elle. Inconséquent par ce qu’il retient d’une doctrine liée dans toutes ses parties, il contient en soi, bien que voilé, le principe immortel de la souveraineté de la raison ; et ce principe, qui est sa vie secrète, sauve l’esprit humain de la servitude où il se serait pétrifié sous l’écrasante pression d’une autorité qui, exigeant de lui une soumission aveugle, une obéissance absolue, et de proche en proche s’étendant à tout, aurait éteint ses puissances actives.