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INTRODUCTION. vii

Dante, Virgile, Béatrix :

L’homme, la raison, la révélation.

Contrairement aux poètes qui l’ont précédé, Dante a dû mettre en scène le moi, pour initier aux sentiments, aux émotions, aux tressaillements les plus intimes de la nature humaine. Homère s’efface complètement dès la première invocation adressée à la muse antique, et semble vouloir persuader aux hommes que son poëme est tombé de l’Olympe.

Dante, au contraire s’élève par degrés du fond de notre poussière jusqu’à la contemplation du triomphe éternel. Il prend pour guide sa maîtresse adorée, sa chère et divine Béatrix, ange miséricordieux et protecteur, qui après lui avoir montré sur la terre un rayon de la gloire céleste, s’était envolée au sein de son Créateur. Béatrix, ainsi que le poète la définit, c’est la plus belle manifestation de la puissance divine, c’est la lumière placée par Dieu entre le vrai et l’intelligence.

Mais pourquoi, dira-t-on, assigner à Virgile le troisième rôle dans un poëme éminemment religieux ? pourquoi choisir un poète païen de préférence aux autres sages de l’antiquité, aux prophètes, et aux saints de l’Ancien Testament ? Virgile répond pour Dante à la grande idée de l’unité politique et morale, qui forme la base principale de la Divine Comédie. Il représente la croyance antique dans son dogme le plus idéal, et la forme de gouvernement rêvée par les gibelins, dans sa plus large application. Virgile avait prophétisé dans une de ses églogues la venue du Fils de Dieu, on le croyait du moins à cette époque ; voilà pour la religion. Virgile était le poète de l’empire romain, voilà pour la politique. En outre, il n’a pas suivi les enseignements d’une seule école, les idées d’un seul maître, les principes d’une seule secte. Il a recueilli toutes les traditions religieuses et philosophiques, toutes les légendes populaires de l’antiquité. Platonicien et spiritualiste avant tout, il n’a pas dédaigné les mystères d’Eleusis, ni les mythes de Pythagore. Son enfer se rapproche le plus des idées chrétiennes ; il a suivi pas à pas la sibylle, dont les livres prophétiques étaient acceptés et débattus par les Pères. Enfin Virgile, introduit dans le poëme pour mar-