Page:Darien - Biribi (Savine 1890).djvu/33

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faire en peu de temps une position magnifique… Tout soldat, a dit Napoléon, porte…

— Oui, la giberne… le bâton de maréchal…

— C’est ça ! c’est ça ! Moque-toi un peu des paroles d’un grand homme !… D’ailleurs, mon ami, tout ce que je t’ai dit, c’est dans ton intérêt. Tourne bien, tourne mal, ça ne peut rien nous faire, au fond. Nous déshonorer, ça, tu ne le peux pas : nous ne portons pas le même nom que toi. La charité chrétienne nous ordonne de faire des vœux pour toi et de te donner de bons préceptes ; quant au reste, ça nous est égal…

C’est curieux, je m’en doutais presque.

— Tâche de monter vite de grade en grade. C’est le meilleur moyen d’avoir un avancement rapide. Surtout, évite les mauvaises compagnies ; il y a partout des gens avec lesquels il ne faut se lier à aucun prix. Si tu es disposé à te bien conduire, à faire la joie de ta famille et l’honneur de ton pays, tu ne les fréquenteras point, tu les laisseras de côté. Du reste, vous ne pourriez pas vous accorder longtemps ; le vice n’a jamais fait bon ménage avec la vertu.

Ça doit être vrai, mais ça ne me semble pas neuf. Je pense avoir lu autrefois, dans Lhomond, cet exemple étonnant : « La vertu et le vice sont contraires, » virtus et vitium sunt contraria.

Tout le monde vient de se lever. Je crois la petite séance terminée et je me lève comme les autres. Ma tante me promet, en me quittant, de me faire cadeau de mon premier uniforme, quand je serai nommé officier. Ma cousine m’offrira un sabre, ― un beau sabre.

Décidément, elles n’ont pas l’air de croire outre mesure à mon avenir.