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II


Voilà six mois que je suis à Nantes, canonnier de deuxième classe au 41e d’artillerie. Six mois ôtés de soixante, restent cinquante-quatre.

— Ça commence à se tirer, dit mon camarade de lit, un Bordelais qui s’est engagé aussi, un cochon vendu comme moi.

— C’est égal, c’est encore rudement long.

— De quoi ? de quoi ? s’écrie un conducteur de la classe 76, un gros garçon qui va être libéré du service dans quelques jours et qui hurle : La classe ! toute la journée. ― De quoi ? On trouve le temps long ? on s’embête ? Est-ce qu’on a été te chercher, dis donc, pour t’amener au régiment ? Est-ce que tu n’y es pas venu tout seul ? Il faut avoir un sacré toupet pour se plaindre de ce qu’on a demandé ! Pourquoi t’es-tu engagé, alors ? Pourquoi n’es-tu pas resté chez toi ?

Alors, dans la chambrée, des rires éclatent, des ricanements grincent.

— La planche à pain était tombée.

— Le four était démoli.