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Page:Darwin (trad. Barbier) — Les plantes insectivores, 1877.pdf/96

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DROSERA ROTUNDIFOLIA.

Il est indispensable de décrire d’abord les effets d’une immersion pendant trente secondes dans l’eau bouillante. Les feuilles deviennent flasques, les tentacules s’inclinent en arrière, ce qui est probablement dû, comme nous le verrons dans un autre chapitre, à ce que les surfaces extérieures conservent leur élasticité pendant plus longtemps que les surfaces intérieures ne conservent la faculté de se contracter. Le liquide pourpre contenu dans les cellules des pédicelles se transforme en granules très-petits, mais il ne se produit aucune agrégation véritable. Cette agrégation ne se produit d’ailleurs pas davantage quand on plonge subséquemment les feuilles dans une solution de carbonate d’ammoniaque. Toutefois, la modification la plus remarquable est que les glandes deviennent opaques et uniformément blanches ; on peut attribuer ce fait à la coagulation des matières albumineuses qu’elles contiennent.

Ma première expérience, expérience toute préliminaire, consista à placer 7 feuilles dans une même capsule et à porter lentement l’eau qu’elle contenait à la température de 110° F. (43°,3 centig.). Je retirai une feuille dès que la température se fut élevée à 80⁰ F (26°,6 centig.), une autre à 85° F., une autre à 90° F. et ainsi de suite. Chaque feuille, dès qu’elle était retirée de l’eau chaude, était placée dans de l’eau à la température ambiante ; tous les tentacules de toutes les feuilles s’infléchirent bientôt légèrement, mais irrégulièrement. Je retirai alors les feuilles de l’eau froide et je les disposai dans un endroit humide en plaçant un petit morceau de viande sur le disque de chacune d’elles. Au bout de quinze minutes, la feuille qui avait été exposée à une température de 110° F. s’était infléchie dans de fortes proportions ; au bout de deux heures, tous les tentacules de cette feuille s’étaient complétement recourbés sur la viande. Il en fut de même des 6 autres feuilles, mais après un intervalle un peu plus long. Il semble donc que le bain chaud augmente la sensibilité de la feuille au point de vue de l’excitation par la viande.

J’observai ensuite le degré d’inflexion que subissent les feuilles, pendant une période de temps déterminée, quand on les laisse dans l’eau chaude conservée autant que possible à la même température ; mais je ne relaterai ici que quelques-unes des nombreuses expériences que j’ai faites. Je laissai une feuille pendant dix minutes, dans de l’eau portée à 100° F. (37°,8 centig.) ; aucune inflexion ne se produisit. Toutefois, chez une seconde feuille traitée de la même façon, quelques tentacules extérieurs s’infléchirent très-légèrement au bout de six minutes et plusieurs autres irrégulièrement au bout de dix minutes, mais sans qu’ils fussent fortement infléchis. Une troisième feuille, maintenue. dans de l’eau portée de 105⁰ à 106° F. (40°,5 à 41°,1 centig.), pré-