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PIGEONS DOMESTIQUES.

Hocker-Tauben). — Je dois à M. Baily un exemplaire de cette race singulière importée d’Allemagne, et qui, quoique certainement assez voisine des Runts, doit cependant, vu ses affinités avec les Messagers, être décrite ici. Le bec, long, est remarquablement recourbé en dessous et crochu, comme le montre la figure que nous donnons plus loin (fig. 24 et 27) à propos du squelette. Les yeux sont entourés d’une large zone de peau d’un rouge vif qui, ainsi que celle des narines, n’est que peu verruqueuse. Le sternum, très-saillant, est très-brusquement arqué en dehors. Les pieds et les tarses sont très-longs, et plus grands que chez les Messagers anglais. L’oiseau est grand, mais les rémiges et les rectrices sont courtes relativement à la grandeur du corps ; un Bizet sauvage, de taille considérablement moindre, avait les rectrices longues de 4,6 de pouce, tandis que dans un grand Pigeon de la variété Bagadotten ces mêmes plumes ne dépassaient pas 4,1 de pouce. Riedel[1] remarque que cet oiseau est très-silencieux.

Sous-race IV. — Messager de Bassorah. — J’ai reçu de Madras, de Sir W. Elliot, deux exemplaires de cette sous-race, l’un en peau et l’autre conservé dans l’alcool. Son nom indique son origine persane. Cet oiseau est très-estimé dans l’Inde, où il est regardé comme distinct du Messager de Bagdad, qui forme ma deuxième sous-race. J’ai pensé d’abord que ces deux sous-races pouvaient être le résultat récent de croisements avec d’autres, bien que l’estime qu’on a pour elles rende cette supposition peu probable. Dans un traité persan[2], qu’on croit avoir été écrit il y a cent ans environ, les races de Bassorah et de Bagdad sont décrites comme distinctes. Le Messager de Bassorah est à peu près de la taille du Bizet sauvage. Par la forme de son bec, portant un peu de peau caronculeuse sur les narines, — l’allongement de ses paupières, — la largeur intérieure de sa bouche, — l’étroitesse de sa tête, — la longueur, proportionnellement un peu plus grande que chez le Bizet, de ses pattes, — par toute son apparence générale enfin, cet oiseau est incontestablement un Messager, bien qu’un des exemplaires eût le bec égal à celui du Bizet. Dans l’autre, — le bec était très-peu plus long, de 0,8 de pouce seulement. Les yeux étaient entourés d’une assez grande étendue de peau nue et légèrement caronculeuse, mais celle des narines n’était qu’un peu rugueuse. Sir W. Elliot m’apprend que chez l’oiseau vivant l’œil paraît très-grand et saillant, ce qu’indique également le traité persan ; l’orbite osseuse n’est cependant guère plus grande que dans le Bizet.

Parmi les diverses races que Sir W. Elliot m’a envoyées de Madras se trouvait une paire de Kala Par, oiseaux noirs à bec un peu allongé, passablement de peau nue sur les narines, et un peu autour des yeux. Cette race paraît plus voisine du Messager que de toute autre race, étant presque intermédiaire entre le Messager de Bassorah et le Bizet. Les noms que portent les diverses variétés de Messagers dans les différentes parties de l’Europe et de l’Inde, indiquent tous la Perse ou les pays voisins comme patrie de cette race. Ceci mérite d’autant plus l’attention, que même en

  1. Die Taubenzucht. Ulm, 1824, p. 42.
  2. Ce traité a été écrit par Sayzid-Mohammed Musari, mort en 1770 ; je dois à l’obligeance de Sir W. Elliot la traduction de cet ouvrage curieux.