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VARIATIONS SINGULIÈRES.

loppés chez les mâles. Dans les Messagers, cela se remarque pour le développement de la peau verruqueuse ; j’ai cependant vu une femelle de cette race appartenant à M. Haynes, et chez laquelle les caroncules étaient considérables. Sur vingt Pigeons Barbes appartenant à M. P. H. Jones, j’apprends, par M. Tegetmeier, que les anneaux de peau verruqueuse entourant les yeux étaient le plus développés chez les mâles. M. Esquilant admet aussi cette règle, mais M. H. Weir, juge des plus compétents, élève quelques doutes sur ce point. Les Grosses-gorges mâles peuvent distendre leurs jabots à un bien plus haut degré que les femelles ; j’ai bien vu une femelle appartenant à M. Evans qui pouvait se gonfler très-fortement, mais le fait est exceptionnel. M. H. Weir, l’heureux éleveur de Pigeons Paons très-estimés, m’apprend que ces oiseaux mâles ont fréquemment un plus grand nombre de rectrices que les femelles. D’après M. Eaton[1], si deux Grosses-gorges mâle et femelle étaient d’égal mérite, la femelle vaudrait le double du mâle ; or, comme les Pigeons s’associent toujours par paires, ce qui exige pour la reproduction un nombre égal des deux sexes, il en résulte que les qualités de mérite sont plus rares chez les femelles que chez les mâles. Il n’y a pas de différence entre les deux sexes dans le développement de la fraise des Turbits, du capuchon des Jacobins, ou de la touffe des Tambours ; il n’y en a pas non plus dans les sauts périlleux des Culbutants. Je signalerai ici un cas un peu différent, celui de l’existence en France[2] d’une variété de Grosses-gorges de couleur vineuse, dont le mâle a généralement le plumage marqueté de noir, ce qui n’a jamais lieu pour la femelle. Le Dr Chapuis[3] signale aussi que chez certains Pigeons de couleur claire, les mâles ont les plumes marquées de stries noires, qui s’accroissent à chaque mue, de sorte que le mâle devient finalement tout tacheté de noir. Chez les Messagers, la peau dénudée et verruqueuse tant du bec que des yeux, et chez les Barbes celle des yeux, augmente avec l’âge. Ce renforcement des caractères avec l’âge, et surtout les différences que nous avons constatées entre les mâles et les femelles sont remar-

  1. O. C., p. 10.
  2. Boitard et Corbié : O. C., p. 173.
  3. Le Pigeon voyageur belge, 1865, p. 87.